Passivité et complicité de la communauté internationale dans le génocide des Tutsi


Le génocide des Tutsi constitue un cuisant échec pour la communauté internationale. Il montre à quel point la solidarité universelle contre les forces du mal, prônée depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale et du génocide des Juifs, a été impuissante.

La communauté internationale porte une lourde responsabilité pour s’être abstenue d’intervenir au Rwanda alors qu’elle était informée de la préparation du génocide.

Depuis décembre 1993, les forces armées et les officiels des Nations unies disposaient d’assez d’informations relatives à un plan d’extermination des Tutsi.

L’ONU fut constamment informée de la prolifération d’armes légères dans la population en dehors des nécessités objectivement reconnues.

Des jeunes Rwandais suivaient de façon accélérée des entraînements militaires et étaient préparés à commettre le génocide à n’importe quel moment.

En vertu de sa mission de préserver la paix et la sécurité mondiales, l’ONU se devait d’agir vite au Rwanda avant que le génocide ne se produise.

L’exacerbation des passions identitaires, la montée des actes de violence par la distribution des armes à feu parmi la population et la propagation de la haine contre les Tutsi étaient autant d’éléments de violation des principes fondamentaux sur lesquels reposent la paix et la sécurité. L’ONU, qui était en droit et en position d’intervenir, manqua à ses engagements en assistant passivement, avec des troupes suffisantes, aux préparatifs des massacres.

Alison Des Forges dénonce la passivité des Nations unies et des puissances qui avaient une influence directe sur le Rwanda face aux préparatifs des massacres : « Les préparatifs des violences s’effectuèrent sous les yeux d’une force de maintien de la paix des Nations unies […].

En tant que gouvernements étrangers les plus impliqués au Rwanda, la France, les États-Unis et la Belgique suivaient la situation qui se détériorait […].

Malgré les signes visibles d’une violence imminente, la France comme les États-Unis ne s’engagèrent dans aucune nouvelle initiative et continuèrent à opérer à l’intérieur des cadres limités caractérisant leur politique au Rwanda depuis un certain temps […] ; la France était certainement au courant des préparatifs des tueries des Tutsi et des opposants au Hutu Power .

Si l’ONU en général, et les puissances qui étaient impliquées au Rwanda en particulier ne peuvent pas prétendre avoir été surprises par le génocide des Tutsi, elles ne peuvent non plus prétendre avoir réalisé quoi que ce soit pour l’arrêter.

Les 2 534 soldats onusiens de maintien de la paix et divers diplomates présents au Rwanda avant le 6 avril se rendirent complices par leur observation indifférente au déroulement des massacres qu’elles auraient pu prévenir et/ou arrêter.

L’ONU, la Belgique et la France et les États-Unis d’Amérique envisagèrent l’évacuation des étrangers et la réduction des forces de la MINUAR (ramenée de 2 534 à 270 soldats, en vertu de la Résolution 912 du Conseil de Sécurité de l’ONU) au moment du déclenchement du génocide.

La communauté internationale s’est également rendue complice du génocide des Tutsi par son refus d’employer rapidement le terme de « génocide » dans la désignation des massacres qui étaient perpétrés au Rwanda.

La désignation du génocide par des termes euphémiques, comme « tueries massives », « luttes tribales sanglantes », « guerre civile », par certains officiels des puissances étrangères empêcha la réussite des tentatives de dénonciation du génocide des Tutsi entreprises par certains organes et institutions.

Le gouvernement intérimaire autoproclamé le 8 avril 1994 a pu orchestrer sans entrave le génocide parce que la communauté internationale en était restée au stade des discussions brouillées par les déclarations révisionnistes des représentants du Rwanda, des États-Unis d’Amérique et de la France au Conseil de Sécurité des Nations unies. Pire, pendant le génocide, le Conseil de Sécurité de l’ONU avait des relations suivies avec le gouvernement intérimaire.

L’ambassadeur du Rwanda avait maintenu son siège et ledit Conseil recevait des représentants dépêchés à New York par le gouvernement intérimaire pour y défendre son point de vue.

Le génocide des Tutsi présente trois caractères particuliers. D’abord, il été perpétré par des Rwandais contre d’autres Rwandais et la participation populaire a été massive. Ensuite, il a été perpétré dans un délai de trois mois et a emporté plus d’un million de personnes.

Enfin, la communauté internationale a été prévenue avant son éclatement, elle a été informée de son déroulement et n’a réagi qu’après son achèvement.

L’État rwandais postcolonial a joué un grand rôle dans l’organisation et dans l’exécution de ce génocide. Pour être complet, il faut ajouter que la passivité de l’ONU et le rôle ambigu de la France ont masqué la planification du génocide et facilité sa mise en œuvre.

Notre propos ici n’est pas d’en débattre, mais d’attirer l’attention des chercheurs sur l’importance de mener des recherches spécifiques sur la nature et le sens du soutien diplomatique, politique et militaire dont ont bénéficié les forces du génocide.

 

 

 

 

AVEC umuringanews.com


IZINDI NKURU

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